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Science nucléaire : établir une cartographie de la maladie d’Alzheimer

March 22, 2017

Parmi la population canadienne, ce sont les femmes de plus de 65 ans qui courent le plus grand risque de souffrir de démence et leur nombre augmente de façon considérable. On s’attend à ce que le nombre de Canadiens atteints de démence soit quasiment multiplié par deux, avec un million d’individus touchés d’ici 2030. Aux États-Unis, un diagnostic de démence est posé toutes les 66 secondes.

Avec une population vieillissante importante et des taux de démence en augmentation, le système de soins de santé, déjà sous tension, est mis à rude épreuve, tout particulièrement les établissements de soins de longue durée. À travers le pays, les listes d’attente pour les soins de longue durée varient en fonction des provinces mais il arrive parfois que les délais d’attente soient supérieurs à un an. En raison d’une demande massive en soins de santé couplée à une pénurie de lits, nombre de personnes âgées sont contraintes de rester chez elles plus longtemps.

Le diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer est une étape importante de la planification, aussi bien pour les patients eux-mêmes que pour leur famille. Une étape devenue plus réaliste grâce à la science nucléaire et à la technique de cinétique de marquage isotopique stable (stable isotope labeling kinetics, SILK).

Les cellules nerveuses de notre cerveau contiennent des protéines tau. Ces protéines ont pour fonction de stabiliser d’autres protéines présentes dans le cerveau, les microtubules. Ces microtubules sont responsables de la structure et du déplacement des cellules. Des découvertes récentes faites par la  faculté de médecine de l’Université de Washington à St Louis aux États-Unis et publiées l’automne dernier révèlent l’importance des protéines tau dans les premiers stades d’évolution de la maladie d’Alzheimer.

« La protéine tau est présente en très grand nombre dans les cellules nerveuses du cerveau. C’est là qu’elle stabilise l’échafaudage des microtubules, qui jouent un rôle critique dans le transport de contenu au sein des cellules. Mais dans le cas de la maladie d’Alzheimer – ainsi que dans d’autres “tauopathies”, comme la paralysie supranucléaire progressive et la démence fronto-temporale – des amas de protéine tau se déposent de façon anormale dans les cellules nerveuses sous forme d’écheveaux. »

Afin d’évaluer l’état de santé et les concentrations de protéine tau d’un patient, on lui administre un isotope stable d’acides aminés, avant de mesurer la quantité de protéine tau marquée produite par son cerveau, au moyen de la tomographie par émission de positrons (TEP). Une fois la quantité de protéine tau connue, les chercheurs peuvent calculer la vitesse à laquelle la protéine est produite et éliminée par le cerveau.

La recherche a permis de démontrer que les cerveaux des personnes les plus susceptibles d’être atteintes de démence présentent une accumulation de protéines dysfonctionnelles et ont plus de difficultés à éliminer les protéines en excès que les cerveaux des patients en bonne santé. Bien qu’il  ne s’agisse pas d’un traitement, cette découverte pourrait toutefois redonner espoir aux patients et à leurs familles.

« Habituellement, nous ne pouvons poser un diagnostic qu’à un stade tardif dans l’évolution de la maladie, lorsque les fonctions cérébrales sont déjà atteintes », a déclaré l’auteur principal de l’étude, Beau M. Ances, M.D., Ph. D., professeur agrégé de neurologie. « Nous souhaitons développer de nouveaux moyens qui nous permettront de poser un diagnostic à un stade plus précoce et de concevoir des études pour tester des médicaments contre l’accumulation de la protéine amyloïde et de la protéine tau. À ce jour, nous ne sommes pas en mesure de prévenir ni de guérir la maladie d’Alzheimer, mais le fait de retarder l’apparition des symptômes de la maladie de 10 à 15 ans ferait une différence énorme pour nos patients, leurs familles et le personnel soignant, ainsi que pour l’économie mondiale. »

En plus de ses travaux sur les protéines tau, l’école s’est vu accorder récemment 4,3 millions de dollars par l’Association Alzheimer en vue d’élargir une étude clinique internationale qui tentera d’identifier des médicaments capables de ralentir ou de prévenir la maladie d’Alzheimer chez les patients génétiquement prédisposés mais ne présentant pas de symptômes. La science nucléaire jouera un rôle important dans cette recherche d’un traitement visant à améliorer la vie des patients dans le monde entier.

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