Mémoire au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement sur les enjeux de la filière uranifère au Québec
Mémoire présenté par John Barrett, président et chef de la direction, Association nucléaire canadienne
au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement sur les enjeux de la filière uranifère au Québec
le 15 décembre 2014
I. Introduction
L’Association nucléaire canadienne (ANC) est heureuse d’avoir la possibilité de témoigner devant le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). En écoutant les points de vue et les préoccupations des collectivités et des citoyens concernant l’exploration et la production d’uranium dans certaines régions du Québec, vous faites un travail très important.
Il y a d’abord lieu de dire quelques mots à propos de l’Association nucléaire canadienne. L’uranium est au cœur de l’industrie nucléaire nationale. Les membres de notre association – une centaine d’entreprises et d’organisations – extraient et concentrent l’uranium et utilisent ses produits dérivés à des fins pacifiques bénéfiques pour l’humanité. Ce faisant, ils procurent à des hommes et à des femmes quelque 60 000 emplois directs ou indirects, créés grâce à leur chaîne d’approvisionnement, et génèrent une activité économique se chiffrant à près de 7 milliards de dollars.
Dans notre mémoire, nous aimerions souligner les avantages de l’uranium dans le domaine de la santé humaine et de la lutte contre le changement climatique. Nous analyserons les mesures qui permettraient de calmer les inquiétudes du public face aux matières nucléaires. Les secteurs de l’extraction de l’uranium et de ses applications en médecine et dans la production d’électricité sont au nombre des secteurs particulièrement réglementés – voire les plus réglementés – au Canada. Des exigences réglementaires rigoureuses et leur application stricte en ce qui a trait aux rayonnements et au traitement des résidus miniers et des stériles assurent la sécurité des citoyens et des employés, tout en protégeant l’environnement de façon efficace sur les terres ancestrales. De fait, certains peuples et collectivités autochtones ont eux-mêmes décidé de participer à la mise en valeur et à l’utilisation de l’uranium, non seulement dans les provinces et territoires du Canada mais aussi à l’étranger. L’uranium offre également aux collectivités la possibilité d’améliorer leurs conditions de vie, leur formation et leur situation en matière d’emploi, car il demeurera un produit en demande dans le monde entier.
II. Avantages de l’uranium
Il faudrait en premier lieu se pencher sur quelques questions fondamentales. Quel est le rôle de l’élément présent à l’état naturel appelé « uranium »? Pourquoi l’uranium devrait-il être important pour les collectivités établies sur un territoire où on en trouve? L’uranium peut-il contribuer au mieux-être de l’humanité? Peut-il aider au traitement et à la guérison de personnes frappées par la maladie? Offre-t-il un moyen pour alimenter les collectivités en électricité indispensable sans rejeter dans l’atmosphère les toxines et les gaz à effet de serre à l’origine du changement climatique?
La réponse à toutes ces questions est « oui ». L’uranium extrait du sol permet de sauver des vies. Grâce à l’uranium, on évite le rejet dans l’atmosphère de millions de tonnes de gaz nocifs. Les terres qui renferment de l’uranium sont une source de santé. Les collectivités dont le territoire renferme de l’uranium ont la possibilité de participer à la guérison de leurs semblables. En ce sens, l’uranium est un bien puissant et les gens devraient en être informés.
Médecine nucléaire
L’utilisation de l’uranium en médecine nucléaire a nettement amélioré la vie de millions de personnes dans le monde. L’uranium alimente les réacteurs nucléaires qui produisent des radio-isotopes médicaux et des produits radiopharmaceutiques permettant aux radiologistes d’effectuer des tomographies (« scans ») pour détecter et visualiser des cancers et d’autres maladies avec une précision qui permet de sauver des vies. Les radiologistes canadiens effectuent environ 30 000 tomographies à des fins de diagnostic chaque semaine – plus de 1 500 000 par an[1].
En 2014, les tomographies effectuées à des fins de diagnostic auront permis de détecter près de 200 000 nouveaux cas de cancer et par le fait même de faire bénéficier les patients visés d’un traitement efficace donné à temps[2]. Rappelons que l’uranium est l’élément clé grâce à la production de cobalt 60 dans les réacteurs nucléaires. C’est au Canada, en 1951, que la radiothérapie au cobalt 60 a été utilisée pour la première fois dans le monde. Ce type de traitement sert à détruire ou à réduire les cellules cancéreuses. Cette année, environ 15 000 Canadiens recevront des doses de radiothérapie, ce qui améliorera leurs chances de survie.
Les Canadiens ne sont pas les seuls à pouvoir survivre grâce à la radiothérapie. On utilise des appareils au cobalt 60 partout dans le monde comme moyen fiable, simple et abordable de donner accès au traitement du cancer. Le Canada est un chef de file mondial dans le domaine : il fournit 76 000 traitements par jour, ce qui représente plus de 80 % de ces procédures[3].
Sans uranium, un grand nombre de ces interventions médicales qui sauvent des vies seraient impossibles. Par exemple, plus de 80 % des tomographies effectuées au Canada misent sur la fission de l’uranium 235 dans les réacteurs nucléaires. Il est vrai que l’on peut obtenir des substances de remplacement au moyen des accélérateurs de particules ou des cyclotrons, mais ces solutions ne remplacent pas complètement les radio-isotopes produits dans les réacteurs. L’uranium demeure donc un élément essentiel de la médecine nucléaire.
Production d’électricité
L’électricité est au cœur de notre vie. Il est difficile d’imaginer un monde sans électricité. Dans de nombreuses régions du monde, la production d’électricité pour les citoyens et les collectivités représente la mesure la plus importante afin d’améliorer l’espérance de vie des populations et leur état de santé
Différentes filières permettent de produire de l’électricité. Malheureusement, nombre des sources d’énergie parmi les plus utilisées ont une teneur élevée en carbone et émettent des gaz nocifs, notamment des gaz à effet de serre. De nombreux scientifiques imputent le changement climatique et le réchauffement planétaire aux quantités croissantes de gaz à effet de serre générés par les activités humaines, notamment la production d’électricité. Comme de plus en plus de pays s’industrialisent, les émissions mondiales de dioxyde de carbone ne cessent d’augmenter et, d’après le Projet mondial sur le carbone[4], elles atteindront un niveau record de 40 milliards de tonnes en 2014.
L’uranium permet de produire de l’électricité en générant très peu d’émissions de carbone grâce à l’énergie nucléaire. Cette forme d’énergie se compare aux énergies renouvelables, comme l’énergie éolienne ou hydraulique, dont les émissions de carbone sur le cycle de vie se situent au-dessous ou autour de 20 grammes par kilowattheure (g/kWh). Puisque la consommation d’électricité des habitations canadiennes se chiffre à environ 30 kWh par jour en moyenne, ces filières n’émettent qu’environ 600 grammes de dioxyde de carbone par jour par habitation, voire moins.
Toutefois, les filières éolienne, solaire et marémotrice totalisent moins de 2 % de la production d’électricité au Canada. En outre, comme leur production est intermittente, ces filières nécessitent une source d’appoint. Si l’on utilise du mazout, du diesel, du propane ou du gaz naturel à cette fin, alors les émissions augmenteront. L’énergie hydraulique génère peu d’émissions de carbone et se situe à égalité avec l’énergie nucléaire.
Il ne s’agit pas ici de s’éterniser sur la production d’électricité. Le Québec a la chance de pouvoir compter sur de nombreux barrages et cours d’eau pour produire de l’électricité. L’hydroélectricité n’est toutefois simplement pas envisageable dans de nombreuses régions du monde. Or, il en va autrement pour la production d’énergie nucléaire. Et comme le changement climatique transcende les frontières et peut avoir des effets manifestes et irréversibles sur l’environnement et l’utilisation des terres, où qu’elles soient, il y va de notre intérêt à long terme de veiller à ce que les combustibles fossiles soient de moins en moins utilisés pour produire de l’électricité – et à ce que les filières qui génèrent très peu d’émissions de carbone, par exemple l’énergie nucléaire ou hydraulique, soient de plus en plus utilisées. Puisque l’on peut facilement accroître la production d’énergie nucléaire à un endroit donné et qu’il s’agit d’une source d’électricité fiable et abordable, elle se révèle utile dans la lutte mondiale contre le changement climatique.
FIGURE 1: ÉMISSIONS DE CARBONNE PAR kWh
Source : Groupe d’experts intergouvernemental sur l’evolution du climat, Special Report on Renewable Energy Sources and Climate Change Mitigation, 2011.
De plus en plus, d’éminents écologistes et climatologues sont favorables à cette approche. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a récemment affirmé que l’énergie nucléaire constitue un élément clé pour assurer une alimentation en électricité à l’échelle mondiale à très faible teneur en carbone, et il a recommandé d’investir des montants considérables dans la capacité de production d’énergie nucléaire[5].
Dans les régions où les modes de vie ancestraux et la relation des gens avec le territoire revêtent une grande importance – comme c’est le cas dans le nord du Québec, de la Saskatchewan et d’autres provinces du Canada –, les répercussions du changement climatique sont ressenties de façon particulièrement vive et pénible. L’extraction de l’uranium constitue donc un apport vital fourni par les populations de ces régions. L’énergie contenue dans l’uranium permet de produire de l’électricité. Il s’agit d’un outil essentiel dans la lutte mondiale contre le changement climatique.
III. Préoccupations des collectivités
Malgré les avantages indéniables qu’il apporte à l’humanité, l’uranium suscite aussi certaines préoccupations dans la population. De nombreux observateurs mal informés adhèrent d’emblée aux allégations soulevées par les opposants au nucléaire selon lesquelles les rayonnements seraient dangereux en soi, les déchets radioactifs nous exposeraient à une menace insurmontable et l’extraction de l’uranium bouleverserait les collectivités.
Les Cris de la baie James ont bien illustré cette approche dans leur témoignage devant le BAPE en mai 2014. Le grand chef Matthew Coon-Come a alors affirmé que l’extraction de l’uranium poserait des risques inacceptables pour la santé et l’environnement des Autochtones et qu’aucune mine d’uranium au Québec ne pourrait obtenir l’acceptation sociale[6].
L’Association nucléaire canadienne respecte pleinement le droit des Cris à déterminer eux-mêmes leur position à l’égard de l’exploration et de la mise en valeur de l’uranium. Par ailleurs, d’après nous, de solides éléments probants fondés sur des faits indiquent que l’industrie nucléaire peut répondre à ces préoccupations.
L’appréhension de la population à l’égard de l’énergie nucléaire est inversement proportionnelle à la connaissance qu’elle a des effets du rayonnement. Nous menons régulièrement des sondages d’opinion publique pour vérifier les connaissances des Canadiens concernant les rayonnements – qu’ils soient d’origine naturelle ou artificielle et qu’ils soient nocifs ou non[7]. Or, nous constatons régulièrement que la plupart des Canadiens ne comprennent pas en quoi consistent les rayonnements et peuvent encore moins l’expliquer en détail[8]. En revanche, ceux qui peuvent expliquer la nature des rayonnements sont favorables à l’énergie nucléaire et à ses autres applications.
Comme la population ne comprend pas bien en quoi consistent les rayonnements, leur présence dans la nature et dans le corps humain et la recherche scientifique approfondie qui a été menée pour déterminer par consensus international les niveaux auxquels les doses de rayonnement peuvent avoir un effet nocif sur la santé humaine, on peut comprendre que les déchets radioactifs des mines d’uranium soient perçus comme un risque pour la collectivité. En réalité, toutefois, il s’agit d’un risque qui a été atténué de façon adéquate grâce à la mise au point de techniques assurant la sûreté et la sécurité. Comme la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) l’a affirmé au BAPE, « le vaste ensemble de données de surveillance et les scénarios d’exposition prudents indiquent que les rejets de radionucléides et de substances dangereuses des mines et usines de concentration d’uranium ne présentent pas de risque pour la santé publique[9] ».
L’extraction de l’uranium est-elle incompatible avec les utilisations ancestrales des terres? Avec l’avantage de la recherche fondée sur des données probantes, il semble qu’une mine d’uranium n’a pas plus d’effets perturbateurs que tout autre type de mine. De fait, elle pourrait même en avoir moins en raison de la surveillance et de la réglementation rigoureuses et constantes de l’industrie. On pourrait ajouter à cela les progrès considérables accomplis par l’industrie elle-même pour ramener les répercussions sanitaires et environnementales à des niveaux bien inférieurs aux limites acceptées à l’échelle internationale.
L’Agence de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour l’énergie nucléaire a récemment conclu que « [traduction] les entreprises modernes d’extraction de l’uranium gèrent efficacement les effets sanitaires et environnementaux et leurs activités sont sans doute devenues l’une des formes d’activités minières les plus sécuritaires et les plus respectueuses de l’environnement dans le monde entier[10] ».
Il est important de souligner le rôle joué par les organismes internationaux spécialisés comme l’Agence de l’OCDE pour l’énergie nucléaire, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), le Comité scientifique des Nations Unies pour l’étude des effets des rayonnements ionisants (UNSCEAR), la Commission internationale de protection radiologique (CIPR) ainsi que d’autres organes et institutions spécialisées du système des Nations Unies dans l’élaboration et l’amélioration continue des normes, des lignes directrices et des pratiques exemplaires dans tous les aspects de la technologie nucléaire. Par exemple, l’AIEA a produit plus d 250 documents portant sur l’extraction de l’uranium, plus précisément le cadre juridique, la sûreté nucléaire, la protection contre les effets des rayonnements ionisants et la consultation publique. Cette année, elle a élaboré au moins quatre nouveaux documents qui traitent expressément de l’extraction de l’uranium ou de la remise en état des sites.
Le Canada souscrit pleinement à ces normes internationales et il les met en œuvre. Par surcroît, il figure souvent parmi les principaux pays qui participent à l’élaboration de normes ou qui formulent des suggestions à la lumière des pratiques exemplaires de son industrie nationale de l’extraction de l’uranium. Des documents récents tels que Managing Environmental and Health Impacts of Uranium Mining[11], publié en 2014 par l’Agence de l’OCDE pour l’énergie nucléaire, soulignent de manière spécifique le leadership des sociétés minières canadiennes, ce qui montre au reste du monde comment il est possible d’exploiter des mines sans renoncer à la protection de l’environnement ou à la sécurité des travailleurs et de la population ou bien de remettre en état des sites miniers pour les ramener à leur état naturel après le déclassement. En fait, la surveillance réglementaire fédérale et provinciale ainsi que les techniques d’assurance de la conformité pour l’extraction d’uranium sont reconnues à l’échelle mondiale – et on les enseigne ou on en fait la démonstration au bénéfice d’autres organismes de réglementation des États-Unis, de l’Asie centrale, de l’Australie et de l’Afrique du Sud.
De son côté, l’AIEA a droit d’accès aux mines d’uranium canadiennes en vertu du Protocole additionnel à l’Accord applicable aux garanties conclu avec le Canada. Son travail consiste à vérifier la nature pacifique des travaux qui y sont réalisés. À cette fin, les inspecteurs de l’AIEA font des observations visuelles, prélèvent des échantillons dans l’environnement, utilisent des appareils pour détecter et mesurer les rayonnements, apposent des sceaux et d’autres dispositifs d’identification et mécanismes inviolables. Ainsi, d’une part, notre industrie de l’extraction de l’uranium est sous l’œil vigilant de l’AIEA et, d’autre part, ses pratiques sont d’une qualité telle qu’elles servent de modèle pour l’élaboration de normes internationales rigoureuses en vue d’assurer une extraction de l’uranium sécuritaire et respectueuse de l’environnement.
L’uranium canadien – pas une source de prolifération d’armes nucléaires
Certains observateurs formulant des commentaires sur l’exploration et l’extraction de l’uranium au Québec ont laissé entendre que les exportations d’uranium pourraient servir à la fabrication d’armes nucléaires ou contribuer d’une manière ou d’une autre à la prolifération de ces armes.
Des mécanismes de contrôle rigoureux sont en place pour empêcher que l’uranium canadien destiné à des fins civiles et pacifiques soit détourné vers des utilisations viles et illégales.
Pour exporter de l’uranium, il faut détenir un permis délivré par la Commission canadienne de sûreté nucléaire sur les conseils du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. L’uranium sera exporté uniquement si l’exportation proposée répond à toutes les exigences canadiennes rigoureuses en matière de non-prolifération nucléaire. Un accord de coopération nucléaire doit avoir été conclu avec le pays importateur et être en vigueur. Ces mesures obligent le pays importateur à se conformer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en s’assurant que le matériel canadien sera utilisé uniquement à des fins pacifiques. Elles définissent aussi des « dispositions administratives » grâce auxquelles le Canada a l’assurance que son uranium est utilisé de façon appropriée. Ces dispositions sont étayées par la Liste des marchandises d’exportation contrôlée, qui indique aux exportateurs éventuels canadiens les marchandises dont l’exportation est autorisée ou non par la loi.
La Commission canadienne de sûreté nucléaire surveille les accords de coopération nucléaire, tandis que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) surveille les obligations incombant à l’État importateur en vertu du TNP. Ensemble, ils donnent aux Canadiens une assurance solide que les matières comme l’uranium ne sont pas détournées pour servir à la fabrication d’armes illégales. D’ailleurs, l’expertise du Canada en matière d’extraction de l’uranium et de réglementation en lien avec la surveillance et la gestion de l’utilisation de l’uranium est reconnue dans la sphère internationale. À l’heure actuelle, l’AIEA demande – et reçoit – l’aide de Cameco pour l’élaboration de procédures visant à améliorer l’inspection des mines d’uranium dans d’autres pays.
IV. Diversité des points de vue autochtones
Les positions adoptées par les Autochtones concernant l’exploration et l’extraction de l’uranium varient considérablement, si bien qu’aucun point de vue ne fait l’unanimité parmi eux à ce sujet. Certains groupes autochtones ont choisi d’empêcher l’exploration et l’extraction de l’uranium, tandis que d’autres profitent pleinement des mines d’uranium en raison de leur potentiel de développement économique.
Par exemple, le Nunavut, territoire autonome administré par les Inuits, étudie actuellement la demande d’AREVA portant sur une mine dont la production estimative se chiffre à 130 000 000 lb près du lac Baker. S’il était approuvé, le projet Kiggavik créerait 750 emplois dans le secteur de la construction et en consoliderait 400 dans le secteur minier pendant plus de dix ans. Il générerait des revenus estimatifs de 1 milliard de dollars pour les gouvernements et l’organisation inuite Nunavut Tunngavik Inc.[12].
L’Énoncé de politique du gouvernement du Nunavut concernant l’uranium énonce cinq conditions que doit respecter tout promoteur d’un projet d’extraction d’uranium :
- L’uranium extrait au Nunavut devra être utilisé à des fins pacifiques et respectueuses de l’environnement.
- Les Nunavummiut doivent être les principaux bénéficiaires des activités de développement liées à l’exploration et à l’exploitation de l’uranium.
- La santé et la sécurité des travailleurs participant au développement des gisements d’uranium et de tous les Nunavummiut doivent être protégées conformément aux normes nationales en vigueur au Canada.
- Les normes environnementales devront être respectées lors de l’exploration et l’exploitation de l’uranium, tout particulièrement en ce qui a trait aux terres, aux ressources hydriques et aux ressources fauniques.
- L’exploration et l’exploitation de l’uranium doivent recevoir l’appui des Nunavummiut, tout particulièrement des collectivités situées à proximité des sites d’exploration et d’exploitation[13].
Dans une économie territoriale entièrement dominée par les dépenses du secteur public, la perspective d’une création d’emplois soutenue à long terme dans le secteur privé s’est révélée très attrayante. C’est d’ailleurs ce qui ressort du témoignage du premier ministre Peter Taptuna devant un comité sénatorial en 2012, alors qu’il était ministre du Développement économique du Nunavut : « Parallèlement à nos efforts de développement de l’énergie hydroélectrique renouvelable, nous espérons que des sources d’énergie plus conventionnelles, comme le pétrole, le gaz naturel et l’uranium, contribueront à transformer notre économie en plein développement[14]. »
Des perspectives similaires se dessinent au Groenland, également un territoire autonome administré par les Inuits. En octobre 2013, le Parlement du Groenland a levé un moratoire remontant à 25 ans sur l’exploration et l’extraction de l’uranium. Depuis, le gouvernement du Groenland a mis en œuvre une stratégie pétrolière et minérale en vertu de laquelle il s’engage à établir un cadre réglementaire pour l’extraction de l’uranium, un système de contrôles à l’exportation et un système pour mettre en œuvre les garanties de l’AIEA[15]. Par la suite, après avoir effectué un relevé pour évaluer 66 zones susceptibles de renfermer des gisements d’uranium, la commission géologique du Danemark et du Groenland a conclu que 28 sites offraient un potentiel élevé ou très élevé[16]. Pour mettre les choses en perspective, signalons que l’Institut danois des études stratégiques a estimé que le Groenland pourrait se hisser parmi les 10 premiers pays producteurs d’uranium, voire parmi les cinq premiers[17].
En Saskatchewan, on a répondu à la question de savoir si les Autochtones peuvent bénéficier des retombées concrètes de l’exploration et l’extraction de l’uranium.
La société Cameco, dont le siège social est établi à Saskatoon, en Saskatchewan, est l’entreprise du secteur de l’uranium cotée en bourse la plus importante dans le monde. Cette société, qui entretient avec les Autochtones des relations exemplaires, cherche activement à connaître le point de vue et les préoccupations des habitants et des collectivités vivant sur les terres où l’uranium est découvert et extrait. Elle a ainsi beaucoup appris sur le savoir autochtone et la façon de protéger les utilisations ancestrales du territoire. Son équipe de direction consulte constamment les collectivités du nord de la Saskatchewan.
Cameco entretient avec les Autochtones des relations fondées sur le respect et la consultation. Il s’agit de relations à long terme ouvertes, sérieuses et mutuellement bénéfiques qui permettent aux collectivités d’en apprendre davantage sur l’entreprise et de lui faire rendre des comptes dans des tribunes libres[18]. Les membres de la collectivité sont encouragés à poser des questions et à exprimer leurs préoccupations, le cas échéant, concernant l’extraction de l’uranium et son incidence sur l’environnement, la main-d’œuvre et les conditions de travail ou encore sur la chasse et la pêche et d’autres activités traditionnelles. Par ailleurs, l’entreprise peut bénéficier de la grande sagesse du milieu, qui s’avère une véritable mine de renseignements sur la façon dont les collectivités considèrent leurs relations avec la Terre et les éléments naturels qu’elle recèle. C’est pourquoi les collectivités autochtones de la région peuvent bénéficier des retombées économiques que l’extraction de l’uranium met à leur disposition avec dignité et respect.
Vingt et un pour cent des 3 600 employés de Cameco et 5 % de ses dirigeants sont autochtones, ce qui fait de l’entreprise le principal employeur industriel d’Autochtones au Canada. AREVA, autre entreprise dominante de l’industrie de l’extraction de l’uranium, compte aussi de nombreux employés autochtones. Ensemble, Cameco et AREVA emploient plus de 1 600 résidents du nord de la Saskatchewan, principalement des Cris, des Dénés et des Métis[19]. Ces deux entreprises ont créé et financé des bourses et d’autres initiatives de formation à l’intention des jeunes de la province, consacrant ainsi 340 500 $ pour offrir de meilleures perspectives aux jeunes autochtones des régions nordiques.
L’industrie de l’extraction de l’uranium stimule grandement le développement économique dans le nord de la Saskatchewan. Manufacturiers et Exportateurs du Canada a indiqué en 2012 que les deux sociétés minières avaient consacré 331 millions de dollars en 2010 au titre des salaires et avantages sociaux des employés. Sur ce montant, elles ont versé 96 millions à des résidents du Nord, qui représentaient environ 50 % des travailleurs de leurs sites miniers.
En plus de créer des emplois directs, Cameco a acquis auprès d’entreprises établies dans le Nord ou appartenant à des Autochtones plus de 70 % des produits et services dont elle avait besoin[20]. Pour vous donner une idée de l’ampleur de la stimulation économique dans le nord de la Saskatchewan, les achats de produits et services de l’industrie de l’uranium en 2011 se sont chiffrés à 1,08 milliard de dollars, dont 43 % (464 millions) au profit d’entreprises établies dans la région.
Cette approche adoptée par l’industrie de l’uranium a été reconnue à maintes reprises. Au cours des cinq dernières années, Cameco a été nommée au palmarès des meilleurs employeurs canadiens pour la diversité, en reconnaissance de son engagement à traiter tous ses employés avec équité et respect[21]. L’entreprise a également reçu à trois reprises la plus haute distinction décernée par le Conseil canadien pour le commerce autochtone, le prix or, pour son programme progressiste de relations avec les Autochtones[22]. Depuis 2009, elle a versé 24 millions de dollars à des organisations et à des groupes communautaires de la région où elle exerce ses activités. En 2010, son usine de raffinage de Blind River a conclu avec la Première nation Mississauga du nord de l’Ontario un accord en vertu duquel les deux parties s’engageaient à unir leurs efforts au bénéfice de la collectivité. En 2003, Cameco a créé et financé la Chaire de recherche Cameco sur la santé autochtone à la fondation du Royal University Hospital à Saskatoon.
V. Excellent dossier en matière de sûreté
De nos jours, l’extraction de l’uranium se démarque des autres activités minières par son dossier très enviable au chapitre de la sûreté et du respect de l’environnement. Cela s’explique par le fait qu’il s’agit d’une industrie particulièrement réglementée, voire la plus réglementée, au Canada.
Pourquoi l’industrie de l’uranium fait-elle l’objet d’une réglementation et d’une surveillance aussi strictes? Ce qui distingue principalement les mines d’uranium des autres types de mines ce sont les rayonnements. C’est pourquoi cette industrie est soumise à une réglementation et à une surveillance particulièrement rigoureuses et c’est aussi pourquoi son dossier en matière de santé et de sécurité est meilleur que celui de toute autre industrie minière comparable.
Comme l’a signalé cette année l’Agence de l’OCDE pour l’énergie nucléaire, « [traduction] dans les pays qui imposent des exigences réglementaires appropriées et qui ont mis en place un organisme de réglementation doté d’un personnel qualifié, les entreprises prospères élaborent des stratégies novatrices pour gérer toutes les répercussions éventuelles de l’extraction et du traitement de l’uranium sur les travailleurs, les collectivités et l’environnement[23] ».
La Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN), organisme autonome qui relève du Parlement, réglemente et autorise les activités de l’industrie de l’extraction de l’uranium au pays. Sa mission consiste à préserver la santé, la sûreté et la sécurité des Canadiens, à protéger l’environnement, à respecter les engagements internationaux du Canada à l’égard de l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. Pour atteindre ces objectifs, la CCSN s’assure que l’industrie se conforme à sa réglementation rigoureuse.
La CCSN délivre un permis pour chacune des étapes du cycle de vie des mines et des usines de concentration d’uranium, depuis la préparation de l’emplacement jusqu’au déclassement et à l’abandon, en passant par la construction et l’exploitation. Elle effectue régulièrement des inspections pour s’assurer que les exigences sont respectées. Dans son rapport public le plus récent, le personnel de la CCSN déclare que « chaque établissement réglementé a satisfait, en 2012, au rendement attendu en matière de santé et de sécurité du public et des travailleurs, sur le plan de la protection de l’environnement, ainsi qu’à l’égard des obligations internationales du Canada[24] ».
Santé et sécurité des travailleurs
Dans l’industrie de l’uranium, comme dans toutes les autres industries minières, la santé et la sécurité au travail sont de compétence provinciale et, par le fait même, les mines d’uranium sont assujetties aux mêmes lois que toute autre mine. Par ailleurs, la radioactivité de l’uranium nécessite un niveau de protection supplémentaire pour les mineurs, la population et l’environnement. C’est la CCSN, l’organisme de réglementation fédéral, qui assure cette protection.
Une réglementation efficace, des méthodes de travail sûres et des technologies de ventilation modernes ont transformé l’extraction de l’uranium pour en faire l’une des activités professionnelles les plus sûres. Les mauvaises conditions de travail qui existaient il y a longtemps – souvent invoquées par les détracteurs de l’industrie – sont vraiment chose du passé.
FIGURE 2: NIVEAUX D’EXPOSITION AUX PRODUITS DE FILIATION DU RADON DANS LES MINES SOUTERRAINES EN UNITÉS ALPHAS-MOIS, CANADA, DE 1940 À 2000
Source : CCSN, Le radon et la santé, 2012.
Comment peut-on prouver ces affirmations? La meilleure façon, c’est de se pencher sur les valeurs reconnues dans la sphère internationale en ce qui a trait aux effets de la radioexposition au fil du temps et au seuil à partir duquel on observe un effet nocif pour la santé.
Après de vastes recherches. la Commission internationale de protection radiologique (CIPR) a déterminé en 1990 qu’une dose de rayonnement de 100 millisieverts par an (mSv/an) constitue l’exposition la plus faible à partir de laquelle on pourrait faire la démonstration d’une augmentation de l’incidence du cancer. En-deçà de ce seuil, on n’a observé aucune augmentation de l’incidence du cancer [25].
Pour les travailleurs des mines d’uranium, l’organisme de réglementation nucléaire canadien établit des normes de sûreté encore plus rigoureuses en réduisant de 50 % la limite de dose. Le CCSN a fixé la limite de dose efficace pour ces travailleurs à 50 mSv par an et à 100 mSv pour une période de cinq ans. À des fins de comparaison, la limite de dose efficace pour la population est de 1 mSv/an[26].
Il est possible de montrer et de documenter que l’industrie de l’uranium respecte amplement les limites prévues pour les travailleurs du nucléaire. Ce rendement opérationnel fait l’objet d’une surveillance et de vérifications minutieuses par la CCSN et les organismes de réglementation provinciaux (voir la figure 3.)
FIGURE 3: COMPARAISON DES DOSES EFFICACES MOYENNES ET MAXIMALES REÇUES PAR LES TRAVAILLEURS DU SECTEUR NUCLÉAIRE DANS LES MINES ET USINES DE CONCENTRATION D’URANIUM EN 2012
Source : CCSN, Rapport du personnel de la CCSN sur le rendement des installations du cycle du combustible d’uranium et des installations de traitement : 2012.
L’excellent rendement de l’industrie de l’uranium en matière de sûreté est d’autant plus remarquable si l’on prend en compte la teneur élevée en uranium du minerai de la Saskatchewan. Par exemple, le minerai extrait de la mine de McArthur River a une teneur en octaoxyde de triuranium (U3O8) de 15,8 % en moyenne, soit une valeur nettement supérieure au rendement de 0,1 % généralement obtenu dans les autres grandes mines d’uranium dans le monde[27]. Pour mettre ces données en perspective, mentionnons que la concentration d’uranium à la mine de McArthur River est environ 150 fois plus élevée que la moyenne mondiale – or, le rendement de l’entreprise au chapitre des limites de dose demeure bien en-deçà des limites réglementaires.
Le dossier de sûreté très enviable de l’industrie de l’extraction va au-delà de radioprotection. Il englobe également tous les aspects de la sécurité au travail – comme l’a souligné l’Institut canadien des mines, de la métallurgie et du pétrole en décernant à Cameco à trois reprises depuis 2000 le Trophée national John T. Ryan pour la sécurité.
La Commission des accidents du travail de la Saskatchewan a déterminé clairement que les travailleurs des mines souterraines en roche dure, particulièrement les mines d’uranium, affichent un taux d’accidents avec perte de temps bien inférieur à celui observé chez leurs homologues travaillant dans la plupart des autres types de mines de même que chez les fonctionnaires, les travailleurs de l’industrie de la construction et les travailleurs agricoles de la province[28].
Santé et sécurité de la population
Les activités d’exploration et d’extraction de l’uranium n’augmentent pas le niveau de radon ou de rayonnement dans l’environnement à l’extérieur du site minier. D’après la CCSN, « le niveau de radon à proximité des mines d’uranium est semblable aux niveaux naturels de radon mesurés dans l’environnement. L’exposition de la population au radon en raison des activités réglementées par la CCSN est pratiquement nulle[29] ».
Il est important de comprendre ce point, on allègue fréquemment que les mines d’uranium pourraient avoir un effet nocif sur la santé de personnes vivant à proximité. Certains chercheurs médicaux ne semblent pas savoir que la surveillance des mines indique systématiquement qu’il n’y a aucun rejet toxique.
Nous nous expliquons. L’an dernier, le Collège des médecins de famille du Canada a informé ses membres que « les études canadiennes [avaient] établi un lien entre le cancer du poumon chez les travailleurs des mines d’uranium et la radioexposition[30] ». Les études en question avaient été menées auprès d’hommes ayant travaillé aux mines Beaverlodge et Port Uranium entre 1932 et 1980. À l’époque, on comprenait mal la sûreté dans les mines d’uranium et on ne l’assurait pas de façon efficace. Les pratiques de sûreté étaient extrêmement différentes de ce qu’elles sont maintenant. Ces études historiques ont révélé un taux élevé de cancer du poumon chez les mineurs. Leurs auteurs n’ont toutefois recueilli aucune donnée sur l’usage du tabac ou les autres facteurs de risque de cancer. Ils ont ainsi fait abstraction d’un aspect important, car l’usage du tabac est associé à plus de 85 % des cas de cancer du poumon au Canada[31].
Récemment, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) a publié une étude sur les mines d’uranium dans laquelle les chercheurs ont passé sous silence de nombreux faits importants et introduit plusieurs erreurs dans le débat public. Ces erreurs sont pleinement documentées dans un mémoire distinct présenté au BAPE par le Dr Michel Plante, ex-médecin responsable à la centrale nucléaire Gentilly 2 d’Hydro-Québec[32]. L’Association nucléaire canadienne avait retenu les services du Dr Plante pour examiner l’étude de l’INSPQ.
Citons à titre d’exemple une erreur ayant trait au niveau de radioexposition de la population. En estimant les risques pour la santé auxquels sont exposées les personnes vivant à proximité d’une mine d’uranium, l’INSPQ a utilisé une approche épidémiologique. Or, les études épidémiologiques examinent les tendances et les effets de l’état de santé et des états pathologiques afin de cerner les facteurs de risque de maladie.
L’élément clé de cette approche est le lien de cause à effet – la capacité de conclure qu’un facteur particulier a causé un résultat particulier. Par exemple, une étude épidémiologique pourrait montrer que les personnes vivant à proximité d’une mine sont plus susceptibles que leurs concitoyens de contracter une maladie donnée. Mais elle ne peut établir aucun lien de cause à effet entre le cancer et la mine. Une expérience scientifique s’impose en pareil cas – une expérience comparant à population exposée avec un groupe témoin qui n’a pas été exposé.
L’INSPQ a également omis de signaler qu’aucune personne vivant à proximité du site d’une mine d’uranium canadienne n’a jamais été exposée à une dose supérieure à 0,01 mSv, soit une exposition égale à 0,01 % de la dose à partir de laquelle les probabilités de cancer commencent à augmenter de façon mesurable.
Protection de l’environnement
Comme d’autres mines de métaux, les mines d’uranium doivent gérer en toute sécurité les stériles, contenir les résidus miniers, traiter efficacement l’eau utilisée dans les procédés d’extraction et de concentration et remettre en état les terrains touchés une fois l’extraction terminée.
Les mines d’uranium doivent faire l’objet d’une évaluation environnementale approfondie avant le début de la construction. Des études de référence documentent l’état de l’environnement avant le projet, cernent les effets éventuels et déterminent les mesures d’atténuation connexes.
En règle générale, les programmes de surveillance prévoient des essais environnementaux – air, eau, végétaux et animaux – à proximité d’une mine et en aval. La qualité de l’eau rejetée dans l’environnement, les émissions dans l’atmosphère et le rendement des installations de gestion des déchets font aussi l’objet d’une étroite surveillance.
Si les stériles sont stockés en surface, ils peuvent produire un lixiviat acide susceptible de libérer des métaux lourds dans l’environnement. Des tests sont effectués pour caractériser tous les stériles et déterminer le type de mesures requises pour les stocker en toute sécurité en surface. Au besoin, l’eau de ruissellement des aires de stockage des stériles est recueillie et traitée en vue d’en éliminer les contaminants. Des couvercles et des systèmes de drainage spéciaux sont également mis en place pour limiter le ruissellement et réduire toutes les répercussions environnementales.
Les résidus miniers sont des déchets solides générés par le traitement du minerai d’uranium ainsi que de fins résidus chimiques des installations de traitement de l’eau. Ils renferment généralement des métaux lourds, par exemple de l’arsenic, du cadmium, du cobalt, du cuivre, du molybdène, du nickel, du plomb, du sélénium et du zinc. Ces résidus contiennent également des radionucléides comme l’uranium, le thorium 230, le radium 226, le plomb 210 et le polonium 210. Les mines d’uranium modernes utilisent des installations techniques conçues de manière à contenir les résidus miniers en toute sécurité au cours de la vie utile d’un établissement et pendant des milliers d’années après le déclassement.
Les résidus des usines de concentration d’uranium peuvent aussi être placés en toute sécurité dans des installations de stockage en surface conçues à cette fin. Ce type d’installation tire parti du terrassement pour contenir les résidus, tandis que la gestion du ruissellement permet d’éviter la diffusion des contaminants. Ces installations peuvent être déclassées sur place en toute sûreté et y demeurer sans danger pour l’environnement pendant de très longues périodes.
Avant d’être rejetées dans l’environnement, toutes les eaux usées des procédés d’extraction et de concentration subissent un traitement visant à éliminer les contaminants.
Dans son rapport de 2012 portant sur le secteur, la CCSN confirme l’excellent rendement de l’industrie de l’uranium sur ces aspects : « En 2012, tous les rejets d’effluents traités dans l’environnement provoqués par des activités autorisées d’extraction et de concentration d’uranium respectaient les limites de rejet fixées dans les permis d’exploitation de la CCSN[33] ». De plus, comme le montre la figure 4, l’industrie se compare avantageusement aux secteurs d’extraction de métaux de base, de métaux précieux et de fer sur le plan de la conformité au Règlement sur les effluents des mines de métaux.
FIGURE 4: POURCENTAGE DES MINES CONFORMES AU RREM PAR SECTEUR, DE 2007 À 2011
Secteur minier | Année | ||||
2007 | 2008 | 2009 | 2010 | 2011 | |
Uranium | 100 % | 100 % | 100 % | 100 % | 100 % |
Métaux communs | 67 % | 60 % | 58 % | 65 % | 65 % |
Métaux précieux | 74 % | 80 % | 79 % | 87 % | 70 % |
Fer | 50 % | 67 % | 50 % | 20 % | 33 % |
Toutes les mines métallières | 71 % | 71 % | 69 % | 75 % | 67 % |
Source : CCSN, Rapport du personnel de la CCSN sur le rendement des installations du cycle du combustible d’uranium et des installations de traitement : 2012.
VI. Réglementation et surveillance – le rôle des provinces
Les mines et les usines de concentration d’uranium sont assujetties à des règlements environnementaux fédéraux et provinciaux. Rappelons que l’industrie minière relève de la compétence des provinces. C’est en raison de la présence de rayonnements – aussi faibles soient-ils – que le gouvernement fédéral intervient. La province joue toutefois un rôle important. Ainsi, elle exerce un contrôle des permis et des licences à toutes les étapes, établit les exigences pour le déclassement et la remise en état et détient des garanties financières versées par les sociétés minières pour s’assurer que ces activités se concrétiseront.
En Saskatchewan, l’extraction de l’uranium doit être autorisée par la province sous le régime de la Environmental Management and Protection Act 2002. L’autorisation provinciale prévoit de nombreuses exigences de protection de l’environnement, notamment l’obligation de produire tous les cinq ans un rapport sur l’état de l’environnement, qui compare les résultats issus de la surveillance avec les résultats prévus pour chaque mine. Les projets proposés sont également assujettis à la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale.
Le ministère de l’Environnement de la Saskatchewan inspecte régulièrement les mines et les usines de concentration. Par exemple, Cameco a fait l’objet en 2013 de 12 inspections – à Rabbit Lake (deux), à McArthur River (quatre), à Cigar Lake (trois) et à Key Lake (trois)[34]. Le ministère réglemente également l’exploration de l’uranium et donne des indications dans les lignes directrices sur l’exploration minérale pour la Saskatchewan[35].
En Saskatchewan, la santé et la sécurité dans l’industrie de l’extraction de l’uranium sont régies par les Occupational Health and Safety Regulations 1996 et les Mines Regulations 2003 de la province. Le ministère des Relations et de la Sécurité en milieu de travail fait régulièrement des inspections de sécurité dans les mines. En 2013, Cameco a été soumise à 24 inspections – à Rabbit Lake (huit), à McArthur River (six), à Cigar Lake (huit) et à Key Lake (deux).
Les activités de déclassement sont régies par les lignes directrices du ministère de l’Environnement pour le déclassement et la remise en état des mines dans le nord de la Saskatchewan. À titre d’exemples d’activités de déclassement et de remise en état progressives terminées et en cours sur le site de mines d’uranium en Saskatchewan, citons les travaux effectués dans les zones d’exploitation à ciel ouvert A, D et B à la mine de Rabbit Lake de Cameco.
Qui plus est, les Mineral Industry Environmental Protection Regulations exigent que tous les exploitants de mines dans la province fournissent une garantie financière pour le déclassement et la remise en état de leur site minier en entier. Le montant de la garantie financière est fondé sur un scénario hypothétique de « déclassement le lendemain » selon lequel l’exploitant cesserait d’exister et ne pourrait donc pas satisfaire à ses obligations en matière de déclassement et de remise en état. Le montant est revu et actualisé tous les cinq ans ou plus souvent si un exploitant apporte des modifications importantes à une mine ou à une usine de concentration. En 2013, les garanties financières pour les cinq installations de la Saskatchewan totalisaient 568,5 millions de dollars.
Lorsqu’un exploitant a terminé les activités de déclassement et de remise en état à la satisfaction des organismes de réglementation, il peut restituer son site à la province en vertu du Programme de contrôle institutionnel, qui a été créé en vertu de la Reclaimed Industrial Sites Act. Cette fois encore, il y a des garanties financières. L’exploitant doit donner en garantie des fonds suffisants pour couvrir le futur coût de surveillance et d’entretien du site. Il ne peut simplement mettre fin à ses activités et quitter les lieux. L’engagement de la société minière se poursuit bien après le déclassement et la remise en état. Il est financé par des fonds considérables et surveillé par la province.
Participation des collectivités
En plus de se conformer pleinement aux lois et règlements fédéraux et provinciaux, les producteurs d’uranium ont pris des mesures supplémentaires sur une base volontaire pour s’assurer que les collectivités et les administrations publiques provinciales et municipales comprennent les décisions concernant l’extraction et la concentration de l’uranium et puissent les influencer.
Par exemple, en Saskatchewan, les entreprises de l’industrie de l’uranium sont régulièrement en contact avec le Comité de la qualité de l’environnement du nord de la Saskatchewan pour permettre aux résidents du Nord d’observer personnellement les mesures de protection de l’environnement prises par l’industrie. Les membres du Comité sont nommés par les collectivités nordiques elles-mêmes. Ils collaborent avec l’industrie et le gouvernement pour s’assurer que toutes les activités minières prennent en compte les besoins et les aspirations des personnes qui sont le plus touchées par les activités industrielles.
Le Comité de la qualité de l’environnement reçoit un appui technique et organisationnel du Secrétariat de surveillance des mines du Nord, organisme provincial dont font partie la CCSN et plusieurs ministères provinciaux compétents. En outre, cinq mines d’uranium dans la province sont certifiées ISO 14001 et leurs exploitants se conforment volontairement à une série de normes internationales qui assurent une bonne performance environnementale et la prévention de la pollution.
VII. Perspectives pour la collectivité
L’extraction de l’uranium est-elle viable sur le plan économique pour la collectivité? L’exploration et la mise en valeur de l’uranium convaincront-elles la collectivité que ces activités génèrent des retombés économiques concrètes pour les résidents de la région et leur famille, en particulier en offrant des emplois, une formation et des possibilités aux jeunes? Bien qu’il soit difficile de faire des prédictions précises à cet égard, certains indicateurs clés permettent d’envisager une croissance soutenue du marché de l’uranium.
Selon les perspectives énergétiques mondiales établies par ExxonMobil, la demande d’électricité augmentera de 90 % entre 2010 et 2040 et cette hausse sera principalement attribuable aux pays en développement. La consommation d’électricité d’origine nucléaire devrait doubler au cours de cette période[36]. Si c’est le cas, il faudra de l’uranium pour alimenter les réacteurs qui produiront cette électricité. Ainsi, il y a tout lieu de croire à une demande soutenue d’uranium.
Les données du marché mondial de l’uranium permettent également de penser que la demande demeurera forte. Entre 2002 et 2012, la production mondiale d’uranium a augmenté de 62 % (voir la figure 5). À la lumière des prévisions fiables de la demande d’énergie au cours des prochaines décennies, la croissance devrait se poursuivre.
D’où vient la demande d’uranium? À l’heure actuelle, on compte 436 réacteurs nucléaires en exploitation répartis dans 30 pays à l’échelle planétaire. En outre, 71 réacteurs sont en construction, dont cinq aux États-Unis. Les autorisations et le financement de projets ont été obtenus pour 174 réacteurs supplémentaires et des propositions ont été présentées pour 301 autres[37]. D’après ces données et les projets de construction prévus, l’industrie de l’extraction de l’uranium peut s’attendre à une forte demande et à des perspectives de croissance vigoureuse.
FIGURE 5: PRODUCTION MONDIALE D’URANIUM, DE 2002 À 2012
Source : Association nucléaire mondiale.
On peut en déduire que l’uranium produit dans une mine au Québec ou dans d’autres régions du Canada trouvera des acheteurs, ce qui signifie une source de revenus pour la collectivité au fil du temps. La planification et l’investissement pour l’avenir de la collectivité et de la population pourront reposer sur une assise économique solide.
VIII. Conclusion
L’uranium présente manifestement des avantages pour l’humanité dans les domaines de la médecine nucléaire et de la production d’électricité. Ainsi, les technologies médicales faisant appel à l’uranium permettent de sauver et d’améliorer des millions de vie et contribueront sans nul doute à de nouvelles avancées à mesure que l’innovation se poursuivra dans le domaine nucléaire. En ce qui a trait à la production d’électricité, l’uranium s’avère une source d’électricité sécuritaire, fiable et abordable qui génère très peu d’émissions de gaz à effet de serre responsables du changement climatique.
En matière de sûreté, l’industrie de l’extraction de l’uranium affiche un rendement exemplaire, comme en témoignent les résultats des inspections régulières dont elle fait l’objet et les nombreuses distinctions qu’elle a obtenues. La production d’uranium est régie par un cadre réglementaire qui permet aux gouvernements provinciaux d’exercer pleinement les pouvoirs qui leur sont dévolus dans leurs domaines de compétence.
Si le Québec permettait l’exploration et la mise en valeur de l’uranium, il exercerait le même pouvoir décisionnel que son gouvernement provincial applique à tous les autres types de mines. Comme nous l’avons vu en Saskatchewan, l’organisme de réglementation fédéral assurerait la radioprotection avec efficacité. Cette approche éprouvée reposant sur la collaboration, appliquée aux mines au cas par cas, assure la sécurité des travailleurs et de la population ainsi que la protection de l’environnement.
La première étape de l’engagement auprès des collectivités en ce qui a trait à l’extraction de l’uranium consiste à les sensibiliser aux avantages de l’uranium sur le plan de la santé, de l’économie et de la lutte contre le changement climatique. Les audiences du BAPE ont révélé que bien des gens au Québec ne sont pas au courant de ces avantages ou ne sont pas à même de les reconnaître. La commission du BAPE peut aider la population à mieux comprendre les tenants et aboutissants de l’extraction de l’uranium en recommandant une approche qui permettra aux collectivités et aux citoyens québécois d’examiner – et d’approfondir – les options qui permettraient à l’industrie de l’extraction de l’uranium d’exercer ses activités de façon prospère, sécuritaire et responsable dans leur région. L’élaboration et le maintien de cette approche passent par une consultation et un débat sérieux se déroulant dans le respect.
Réferences
[1] www.hc-sc.gc.ca/dhp-mps/brgtherap/activit/fs-fi/index-fra.php
[2] www.cancer.ca/~/media/cancer.ca/CW/cancer%20information/cancer%20101/Canadian%20cancer%20statistics/Canadian-Cancer-Statistics-2014-FR.pdf
[3]Énergie atomique du Canada ltée. La pénurie d’isotopes médicaux en 2009 et 2010 : cause, effets et considérations futures. Cité dans www.parl.gc.ca/content/lop/researchpublications/2009-04-f.htm
[4] Le Quéré, C., R. Moriarty, R. M. Andrew et coll. « Global Carbon Budget 2014 », Earth Systems Science Data, 7, p. 521-610, 2014.
[5] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Résumé à l’intention des décideurs – Changements climatiques 2014, Atténuation du changement climatique. Contribution du Groupe de travail au cinquième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat [O. Edenhofer, R. Pichs-Madruga, Y. Sokona, E. Farahani, S. Kadner, K. Seyboth, A. Adler, I. Baum, S. Brunner, P. Eickemeier, B. Kriemann, J. Savolainen, S. Schlömer, C. von Stechow, T. Zwickel et J.C. Minx (sous la dir. de)]. Cambridge University Press, Cambridge, Royaume-Uni, et New York, NY, États-Unis.
[6] www.bape.gouv.qc.ca/sections/mandats/uranium-enjeux/documents/TRAN1.pdf
[7] Les rayonnements peuvent être d’origine naturelle ou artificielle. De nombreux types de rayonnements causent peu d’effets nocifs, voire aucun, par exemple les rayons ultraviolets et les signaux de télévision. Seuls les rayonnements ionisants peuvent provoquer des maladies chroniques comme le cancer.
[8] Innovative Research Group. 2014 Nuclear Attitudes Report, août 2014.
[9] Commission canadienne de sûreté nucléaire. Les rejets des mines et usines de concentration d’uranium dans l’environnement posent-ils un risque pour la santé de la population?, présentation au BAPE, le 17 septembre 2014.
[10] Agence de l’OCDE pour l’énergie nucléaire, Managing the Environmental and Health Impacts of Uranium Mining. p. 13.
[11] www.oecd-nea.org/ndd/pubs/2014/7062-mehium.pdf
[12] Mémoire présenté par AREVA à la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions. http://kiggavik.ca/wp-content/uploads/2013/04/Kiggavik_DoubleSided_Factsheet_March2012_sm.pdf
[13] Gouvernement du Nunavut. Énoncé de politique du gouvernement du Nunavut concernant l’uranium. www.gov.nu.ca/sites/default/files/634758736252383817-1979414285-gn_uranium_policy_statement_fre.pdf
[14] www.parl.gc.ca/content/sen/committee/411%5CENEV/17EVB-49411-f.HTM
[15] http://naalakkersuisut.gl/~/media/Nanoq/Files/Publications/Raastof/ENG/Greenland%20oil%20and%20mineral%20strategy%202014-2018_ENG.pdf
[16] www.geus.dk/geus-general/announcements/mimarapport2014-01.pdf
[17] http://subweb.diis.dk/graphics/Publications/Policybriefs2012/PB_should-Greenland-mine%20its%20uranium_web.pdf
[18] www.cameco.com/sustainable_development/2012/supportive_communities/case_studies/aboriginal_engagement/
[19] www.saskmining.ca/uploads/general_files/24/sma_general-fact-sheet-2014.pdf
[20] Manufacturiers et Exportateurs du Canada. The Economic Benefits of Canada’s Uranium Mining Industry, septembre 2012.
[21] Cameco. Cameco Again Recognized as a Top Diversity Employer. www.cameco.com/media/news/cameco-again-recognized-as-a-top-diversity-employer
[22] www.cameco.com/sustainable_development/2012/about_cameco/relationships_and_partnerships/
[23] Agence de l’OCDE pour l’énergie nucléaire. Managing Environment and Health Effects in Uranium Mining, p. xx
[24] Commission canadienne de sûreté nucléaire. Rapport sur le rendement des installations du cycle du combustible d’uranium et des installations de traitement. Ottawa, 2014. www.suretenucleaire.gc.ca/pubs_catalogue/uploads_fre/CNSC-Report-Performance-Canadian-Uranium-Fuel-Cycle-Processing-Facilities-2012-fra.pdf
[25] Commission internationale de protection radiologique. 1990 Recommendations of the International Commission on Radiological Protection, 1991.
[26] www.nuclearsafety.gc.ca/fra/resources/radiation/introduction-to-radiation/radiation-health-effects.cfm
[27] Cameco. McArthur River/Key Lake. www.cameco.com/businesses/uranium-operations/canada/mcarthur-river-key-lake; Association nucléaire mondiale. Uranium Mining Overview. www.world-nuclear.org/info/Nuclear-Fuel-Cycle/Mining-of-Uranium/Uranium-Mining-Overview/
[28] Commission des accidents du travail de la Saskatchewan. Statistical Supplement 2011, p. 6-7.
[29] www.nuclearsafety.gc.ca/fra/resources/mythbusters/index.cfm
[30] www.cfp.ca/content/59/5/e215.full
[31] www.nuclearsafety.gc.ca/fra/resources/health/health-studies/eldorado/index.cfm
[32] Michel Plante, MD. Revue technique : Document SAN6 – BAPE 6211-08-012.
[33] CCSN, Rapport du personnel de la CCSN sur le rendement des installations du cycle du combustible d’uranium et des installations de traitement : 2012, p. 18.
[34] Information communiquée à l’ANC par la société Cameco.
[35] Ministère de l’Environnement de la Saskatchewan. Mining Exploration Guidelines for Saskatchewan, 2012.
[36] ExxonMobil. The Outlook for Energy: A View to 2040, 2014. http://cdn.exxonmobil.com/~/media/Reports/Outlook%20For%20Energy/2014/2014-Outlook-for-Energy-low-resolution.pdf
[37] Association nucléaire mondiale. World Nuclear Power Reactors and Uranium Requirements. http://world-nuclear.org/info/Facts-and-Figures/World-Nuclear-Power-Reactors-and-Uranium-Requirements/